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    LE GIVRE

    Mon dieu comme ils sont beaux
    Les tremblants animaux
    Que le givre a fait naître
    La nuit sur ma fenêtre !

    Ils broutent des fougères
    dans un bois plein d’étoiles,
    Et l’on voit la lumière
    À travers leur corps pâles.

    Il y a un chevreuil
    Qui me connaît déjà ;
    Il soulève pour moi
    Son front d’entre les feuilles,

    Et quand il me regarde,
    Ses grands yeux sont si doux
    Que je sens mon cœur battre
    Et trembler mes genoux.

    Laissez-moi, ô décembre !
    Ce chevreuil merveilleux.
    Je resterai sans feu
    Dans ma petite chambre.

     

    Maurice Carême


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    L'hiver

    C'est l'hiver sans parfum ni chants... 
    Dans le pré, les brins de verdure 
    Percent de leurs jets fléchissants 
    La neige étincelante et dure.

    Quelques buissons gardent encor 
    Des feuilles jaunes et cassantes 
    Que le vent âpre et rude mord 
    Comme font les chèvres grimpantes.

    Et les arbres silencieux 
    Que toute cette neige isole 
    Ont cessé de se faire entre eux 
    Leurs confidences bénévoles...

    - Bois feuillus qui, pendant l'été, 
    Au chaud des feuilles cotonneuses 
    Avez connu les voluptés 
    Et les cris des huppes chanteuses,

    Vous qui, dans la douce saison, 
    Respiriez la senteur des gommes, 
    Vous frissonnez à l'horizon 
    Avec des gestes qu'ont les hommes.

    Vous êtes las, vous êtes nus, 
    Plus rien dans l'air ne vous protège, 
    Et vos coeurs tendres ou chenus 
    Se désespèrent sur la neige.

    - Et près de vous, frère orgueilleux, 
    Le sapin où le soleil brille 
    Balance les fruits écailleux 
    Qui luisent entre ses aiguilles.

     

    Anna de Noailles (1876.1933)


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  • Divers

     

    L'HIVER

     

    Tous les canaux sont pris de glace

    Et les enfants joyeux se mettent à patiner.

    Parfois on aperçoit des traces

    Creusées dans la neige fraîche : des pas de sangliers,

    De leur excellent odorat

    Sous la neige épaisse, ils cherchent avec leur groin

    Châtaignes et glands, rien n'échappera...

    Car en janvier : la laie met bas ses marcassins.

    Jamais elle ne s'éloigne et veille

    Sur son nid de branches, caché, appelé chaudron,

    Là ses "petits rayés " sommeillent,

    Blottis l'un contre l'autre, attendant les mamelons.

    Certains chevreuils tentent une sortie

    Pour glaner dans les champs les restes des cultures,

    Et l'on entend au loin glapir

    Un couple de renards, insouciants dans leur rut.

    Essoufflés d'avoir tant couru,

    Les gosses rentrent à la maison près du feu de bois.

    Le soir, ils s'amusent les doigts nus,

    Sur les vitres givrées, à pousser les étoiles.

     

     

     (Jean-Claude Brinette)


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